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Tumu ’ ānani Oranges de Tahiti

Tumu ’ ānani Oranges de Tahiti

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Tumu ’ ānani Oranges de Tahiti

Des agrumes en patrimoine

Quand on a la chance de les voir sur leur arbre, grossir durant les pluies, jaunir de bonheur au soleil de l’après-midi, gonfler de plaisir avant la cueillette, sans aucun traitement, on se dit qu’à Tahiti, on a peut-être bien les meilleures oranges du monde.

L’oranger est un arbre dont les premières plantations ont été localisées dans l’ensemble malais, comprenant les contreforts himalayens, l’Inde, la Chine et quelques îles d’Asie du Sud-est. Quelques siècles après Jésus-Christ, on cultivait des oranges au Moyen Orient. La conquête musulmane du sud de l’Europe vit apparaître des orangers jusqu’à sud de Tolède. Les croisés aux 12e-14e siècles répandirent ces agrumes partout où elles poussaient en Europe, généralement jusqu’au sud du parallèle 45.
Lors de son premier voyage autour du monde, le capitaine James Cook, arrivé à Batavia (Jakarta actuelle en Indonésie), alors comptoir des Indes néerlandaises, fut impressionné par la variété d’agrumes disponibles : oranges douces, citrons verts (limes), citrons jaunes (lemons), pamplemousses et autres tamarins, melons, etc. (An account of a voyage round the world, in 1768-1771, Volume 1, p. 334, William Smith, 1842). Enrichi de lectures, il comprit très vite l’intérêt de transporter de tels fruits lors de ses circumnavigations. En effet, les agrumes contiennent des vitamines qui empêchaient ou retardaient l’apparition du scorbut, dont les ravages (pourrissement des gencives, chute des ongles, des cheveux et des dents…) lors de ces grandes expéditions pouvaient mettre en danger tout l’équipage. Est-ce ainsi que l’orange est arrivée à Tahiti ? Il semblerait en tout cas que ce soit l’équipage de Cook lui-même, lors de son troisième et dernier voyage à Otaheite, qui apporta des pieds d’orangers ou des graines. Si l’on en croit la tradition, ces pieds furent plantés sur les terres nouvellement conquises par Pomare, à la Pointe Vénus d’abord, ancien domaine de Purea et Amo de Papara.

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A Tahiti, au début du 19e siècle, les Polynésiens avaient répandu les orangers, qui poussaient si bien que de vastes orangeraies avaient vu le jour, concurrençant le cocotier, depuis Mahina jusqu’à la Presqu’île, surtout en plaine.
Si le commerce avec les Anglais et Sydney s’était essoufflé en raison du Protectorat français, après 1842, les Américains furent vite séduits par ces oranges juteuses, disponibles à partir de mai pour les plus précoces et jusqu’en août pour les oranges de montagne. Et ce furent bientôt des millions d’oranges (jusqu’à 7 millions dans les années 1870, selon Le Messager de Tahiti) qui partirent sur les goélettes, de Papeete, Atimaono ou des baies de la Presqu’île pour San Francisco.

Le site Tahiti Héritage raconte ainsi que “ des femmes et des enfants enveloppaient une à une la oranges dans des feuilles sèches de pandanus, et les groupaient par cinq. Elles étaient ensuite déposées dans des caisses rectangulaires, très légères, étaient faites avec des branches décortiquées de purau, liées par des lanières d’écorce. Ces caisses contenaient chacune 500 ou 1 000 oranges ”.
Le commerce avec la Californie fit le succès des orangers de Tahiti. Il fut aussi son fossoyeur. Un navire apporta dans ses cales une maladie. On ignore si ce fut un champignon ou un parasite. Mais les orangers de plaine dépérirent peu à peu. A la fin de la Première Guerre mondiale, il ne restait de ces agrumes triomphants que les orangers de montagne, apportés là par des chasseurs ou des récalcitrants au nouvel ordre qui régnait en plaine. Les plateaux autour de Punaauia, Tamanu, Rata, Puharuru, ont conservé leurs orangers. Certaines vallées de Moorea, Raiatea ou de la Presqu’île aussi. On s’en régale d’ailleurs chaque matin depuis début juin.
La cueillette des oranges avait employé des centaines de personnes. C’est aujourd’hui une fête et un hommage, désormais entretenu par la municipalité de Punaauia. Et l’on dit ici, sans chauvinisme bien sûr, que l’orange de Tahiti est la meilleure du monde !

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Produit en question…

A retrouver dans le magazine Tama’a n°04

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