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Marara de Huahine Poisson volant

Marara de Huahine Poisson volant

marara peche traditionnelle

Marara de Huahine Poisson volant

Le poisson qui aimait voler

On le voit s’envoler soudain, alors que le bateau file sur l’onde.
Fuit-il un fantôme ? Jamais nous n’apercevons l’ombre de son prédateur.
Mais quand il se hisse à la surface, le spectacle est magnifique.
Il n’échappe cependant pas toujours à son chasseur, surtout l’habile pêcheur.
A Huahine, on aime le déguster au retour de pêche, le filet juste levé au couteau, quelques gouttes de citron en simple accompagnement.

Il semble que des milliers de ces poissons volants entraient, pendant plus de deux semaines par les passes (ou l’une des deux passes ?) de Fare, à Huahine. De ce fait, de nombreux prédateurs profitaient de la situation : thons et carangues, marlins, probablement aussi des oiseaux marins, peut-être des cétacés comme des dauphins (grands consommateurs de mārara), et d’autres prédateurs, benthiques cette fois mérous, grands labres, etc.
Une fois ayant atteint le niveau de la plage, les mārara femelles enterraient leur tête à l’intérieur du sable, avant de frayer. Ce comportement, maintes fois confirmés par les locaux de Huahine, se révèle être un détail de la plus grande importance. Car si l’on veut revoir des mārara en grand nombre à Huahine, des zones non anthropisées (sans humains ni activités humaines) doivent être définies et protégées.

Dans À la poursuite du soleil*, Alain Gerbault en avait admiré le spectacle :“Loin du Firecrest, des bonites poursuivaient, en compagnie de dorades, des poissons
volants.” C’est le symbole de l’OPT ; la sculpture en bois qui surplombe les tapis roulants déversant vos bagages à l’aéroport international de Tahiti Faa’a. Ou encore l’un des principaux symboles de la mairie de Huahine. Moins glamour, c’est le nom d’un missile, l’exocet (de son nom scientifique latin Exocœtus volitans) ou de navires de guerre de l’US Navy (USS Flying Fish). De quoi parlons-nous ? Du poisson volant bien sûr, mārara en reo ma’ohi. On l’appelle ainsi parce que ses nageoires pectorales, très développées (inhabituellement larges surtout), lui permettent de sauter hors de l’eau et de planer, sur quelques dizaines de mètres, pour tenter d’échapper à ses prédateurs pélagiques : marlins, espadons, dorades coryphènes, dauphins et autres thonidés. Ses nageoires pelviennes peuvent être plus larges également, donnant à ces poissons quatre espèces “ d’ailes ”. S’il sent la menace, il se prépare à un vol plané.
Le poisson fonce alors rapidement près de la surface de l’eau, avec ses nageoires près du corps. Lorsqu’il sort de l’eau, il les déploie. Sa caudale est alors, en général, très hérissée et il vise une vitesse de 60 km/h pour semer ses poursuivants, un peu déstabilisés d’avoir perdu de vue leur proie. Si la queue, dans un parfait battement de métronome traîne un peu lors de l’envol, elle finit elle-aussi hors de l’eau. Des vols de plusieurs centaines de mètres ont été observés. Mais si cela se reproduit, des contrôles anti-dopages seront à prévoir !

Développement durable…
A Huahine, depuis la nuit des temps jusqu’aux années 1970-1980, les anciens racontent que les mārara venaient pondre sur certaines plages, au moment où le vavai (kapokier) est en floraison. Une fois ayant atteint le niveau de la plage, les mārara femelles enterraient leur tête à l’intérieur du sable, avant de frayer. Ce comportement fut maintes fois confirmé par les locaux de Huahine. Les aspérités des surfaces inférieures des quais en béton, les morceaux de bois flottant, tout servait de lieu de ponte. Il est probable que le mâle fécondait de sa semence les œufs d’une ou de plusieurs femelles.

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C’était l’époque du Rahui, une gestion exemplaire où l’on ne prélevait jamais plus que ce qui était permis et où, durant certaines périodes, la pêche était tout simplement interdite. On laissait ainsi les espèces en paix, de façon à n’en jamais menacer la survie. Une leçon pour tous les enfoirés de chalutiers géants qui raclent les fonds marins avec l’aval des instances internationales corrompues. Puis la modernité est arrivée, le Rahui s’est perdu et les mārara ont disparu des plages de Huahine. Car les pêcheurs, sans encadrement, en ont profité pour tendre des filets à l’entrée des passes et aussi sur le bord des plages de ponte. Les poissons volants, capturés avant d’avoir pu pondre, n’ont pas pu se reproduire. Les suivants ont déserté le lieu historique de leur ponte, quitte à déposer leurs œufs sur des algues ou objets flottants, au large, augmentant ainsi le risque de mortalité des jeunes. La mairie de Huahine aurait ainsi pu perdre définitivement le symbole de son logo municipal. Sauf que les mārara sont revenus, en petit nombre. On les a revus, depuis les années 2000, de façon irrégulière, comme s’ils cherchaient à savoir si les lieux de ponte étaient toujours disponibles, si les filets dans les passes avaient été retirés… Il semble qu’en 2009, une mission scolaire avait débouché sur une entente entre hôteliers, mairies et habitants de Huahine pour réserver des zones des plages littorales aux mārara. Près de 10  années plus tard, qu’en est-il ?

Note de la rédaction : le poisson volant n’est pas sur la liste des espèces menacées, ni en Polynésie, ni ailleurs. C’est pourquoi nous le mettons à l’honneur des recettes, c’est une évidence. Cependant, avoir le droit de se régaler d’un mammifère ou d’un poisson, d’un coquillage ou d’un mollusque n’empêche pas, au contraire, de s’assurer qu’ils ne sont pas menacés, ni que nous faisons ce qu’il faut pour que les conditions de leur renouvellement, soient assurées, sans menaces pour les autres espèces.

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Produit en question…

A retrouver dans le magazine Tama’a n°02

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